Situations du monde après la crise COVID-19

*À court terme, les pertes sont inévitables*

Aux États-Unis, il n’aura fallu que quinze jours pour que près de 10 millions d’Américains se retrouvent au chômage. En Europe, 900 000 Espagnols ont déjà perdu leur emploi. En France, l’INSEE estime qu’un mois de confinement devrait nous coûter 3 points de PIB. Nul n’est épargné. Et à en croire le FMI, : « Nous n’avons jamais vu l’économie mondiale s’arrêter net. C’est bien pire que la crise de 2008 ». Ces chiffres terribles conduisent certains à adopter une grille de lecture martiale de notre crise. Les gouvernements, les Nations Unies, le FMI, tous parlent d’une « guerre » contre le Covid-19. Pour autant, un conflit armé ne semble pas nécessairement refléter la nature de la paralysie économique qui nous frappe. Plus qu’une destruction de capital, c’est une évaporation des savoirs, notamment ceux nichés dans les entreprises qui feront nécessairement faillite, qui est à redouter. Plus qu’une redirection de la production vers une économie de guerre, on assiste à un coma organisé et à un délitement subi mais sans doute durable des chaînes d’approvisionnement.

Pour les pays les plus fragiles, la pandémie s’annonce catastrophique. Un certain nombre d’exportateurs de matières premières, et au premier plan les producteurs de pétrole, entrent dans la crise avec un niveau insuffisant de réserves en devises. Le prix du baril est passé sous les 20 dollars, et celui du cuivre, du cacao et de l’huile de palme s’est effondré depuis le début de l’année. Pour les pays bénéficiant largement d’envois de fonds depuis l’étranger (4), 2020 pourrait voir la consommation et l’investissement se contracter violemment. Quant aux destinations touristiques, celles-ci devront survivre à un arrêt quasi-total de l’activité économique en première partie d’année (5).

Ce revers économique risque de replonger des millions de personnes de la « classe moyenne émergente » vers l’extrême pauvreté. Or, plus de pauvreté, c’est aussi plus de morts. Les pays africains sont plus jeunes, mais aussi plus fragiles, avec des taux de malnutrition, ou encore d’infection HIV, ou de tuberculose les plus élevés au monde, ce qui pourrait rendre le coronavirus encore plus létal. De plus, là où les pays développés peuvent adopter des mesures de confinement drastiques, cela est souvent impossible dans des contextes de bidonvilles urbains surpeuplés, où l’eau courante est difficilement accessible et où s’arrêter de travailler ou d’aller au marché pour acheter des denrées n’est pas une option. L’expérience d’Ebola a montré que la fermeture des écoles – adoptée par 180 pays dans le monde – se traduit souvent par un abandon définitif de la scolarité, des grossesses non voulues, et une éducation sacrifiée pour une génération d’élèves

*Pourrait-on éviter ces conséquences dramatiques ? Sans doute pas totalement, mais certainement en partie si nous sommes capables d’éviter les effets cumulatifs de la récession en combattant l’affaissement de la courbe de demande globale.*

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